À question ultime, réponse ultime. Quel est le sens, autrement dit, la signification, de la vie ? Il n’y en a pas. Sauf à croire en un être suprême – ce qui n’est pas mon cas -, sauf à se réfugier derrière le paravent des croyances qui nous tiennent à peu près debout face à notre néant. Nous en venons. Nous y retournons. La vie : simple couinement dans un océan de vide ? Comme une éraflure ou un rai de lumière – à vous de voir -, une poussière de conscience dans le néant de la conscience et l’infinité de la poussière. Pourtant, cette poussière-là est notre unique univers. Notre unique horizon. Et puisque tout est dit déjà car il n’y a rien à en dire, tout devient possible. La vie est une matière à pétrir, une pâte à modeler. Une œuvre toujours déjà en devenir, jamais aboutie. Détruite avant que d’être. Mais alors, quels éphémères artistes sommes-nous ? Et si la seule vraie question était celle-là ?
Si la seule vraie question était celle-là, voici ce que j’en dirais.
Notre responsabilité de vivant est grande. Comme le papillon a le devoir d’être beau, élégant, virevoltant, même trois jours, nous l’avons d’être des artistes œuvrant au mieux. Une vie courte n’est pas forcément petite. Une vie courte peut être dense, intense, riche. Un émerveillement, une lueur dans la nuit. Une vie courte peut être grande.
Une vie grande est une vie de sagesse, si le sage, comme Comte-Sponville l’exprime si bien, « regrette un peu moins, espère un peu moins et aime un peu plus. » Nietzsche, après Marc-Aurèle, ne dit pas autre chose : « amor fati. » Aimer ce qui est, aimer son destin.
Regretter un peu moins c’est se débarrasser du passé. Il n’a aucune importance, il n’est plus. Fi de nos culpabilités. Fi de nos mauvais choix, fi de nos erreurs de trajectoire. Embarquez au présent les leçons du passé si et seulement si elles servent votre présent. Mais rompez avec le passé définitivement. Il est entrave. C’est l’une des premières techniques enseignées au jeune conducteur : regarde devant ! Le cavalier ne s’y prend pas autrement. Quant au motard, sa survie en dépend. Carrément. Regarder devant.
Espérer un peu moins c’est se débarrasser du futur. Des angoisses du futur. Des peurs du futur. Le futur n’a pas plus d’importance. Il n’est pas encore. Luc Ferry est clair à ce sujet : « une vie bonne, une vie réussie, est une vie sans peur. » Et notre incapacité à être bien tient souvent aussi de notre incapacité à apprécier ce qui est, à goûter ce qui est, à accepter ce qui est. Si vous vous concentrez sur ce que la vie ne vous donne pas, votre frustration est permanente. Votre angoisse. « Le temps court et je n’ai pas encore accompli tel rêve, vécu telle histoire, traversé tel continent. »
Acceptez. Acceptez ce qui est. Appréciez ce qui est. Pendant longtemps, mes 65000 kms parcourus par an en voiture, les embouteillages, ont pesé sur mes jours. Aujourd’hui je roule plus encore, les routes et autoroutes sont plus encombrées encore, les embouteillages insensés, les heures au volant innombrables. Depuis que j’ai accepté ça, tout ça, je ne suis plus affecté. Ou moins.
Mes nuits d’insomnie aussi ont pesé. Je les ai acceptées. Acceptées les douleurs, les souffrances, catapultées dans mes chansons. Utiles les douleurs, utiles les souffrances, pour entrer plus et mieux en empathie avec l’autre. Avoir vécu beaucoup pour comprendre plus et aider mieux. Même les souffrances sont utiles. Si acceptées. Apprivoisées.
Aimer un peu plus c’est donc ça : accepter le présent. Retrouver la magie de l’instant. Les châteaux de sable, les sculptures de glace, sont magnifiques parce que fugaces. Et quoi ? Leur fugacité devrait nous en détourner ? Nous empêcher d’en savourer l’harmonie, la pureté, la perfection ?
Si la vie n’était qu’un seul battement de cils, ce battement serait. Et le sens du battement serait le battement. Comme le sens de la vie est la vie. Ni entrée, ni sortie. Juste la vie pour la vie. Un battement de cils d’artiste : harmonieux, pur, parfait. Ou y tendant. Une vie d’artiste donc. Harmonieuse, pure, parfaite. Ou y tendant. Chercher la beauté pour la beauté.
Pratiquement, car la philosophie peut être opérative, l’artiste est celui qui cultive son talent. Qui le pousse à son paroxysme. Quel est le vôtre ? Pratiquement, l’artiste réussit moyennant trois conditions : il insuffle de la passion dans tout ce qu’il fait, dans tout ce qu’il est. Il apprend les meilleures techniques, il modélise les stratégies d’excellence. Il travaille, travaille, travaille, travaille, travaille, travaille, travaille, travaille, travaille, travaille, travaille, …
Si chacun de nous comprend que le sens de la vie est de ne surtout pas le chercher, mais bien de vivre grandement en nous sachant si petits, si chacun de nous choisit sa plus belle pierre – son talent -, la taille, la polit, si chacun de nous devient un artiste, un grand artiste, alors l’œuvre humanité sera plus belle, plus harmonieuse, plus pure, plus parfaite. Ou y tendant.
Vivons en artistes les Amis. Voler avec les Aigles, c’est ça.
Fabian
P.S. : Cet article participe au carnaval d’articles « Comment donner du sens à sa vie » du site http://developpementpersonnel.org, organisé par Jean-Louis du site http://mavieenmains.com
Bonjour Fabien,
Merci pour cet article et qui donne une autre façon de donner un sens à sa vie.
C’est vrai l’instant présent refroidi nos intentions, nous fait marcher droit devant, en s’occupant que de l’ici et maintenant.
Je suis convaincue que la peur est l’empêcheuse de nous retrouver pleinement dans le présent.
Merci pour ce moment ici et dans l’instant.
Laska
Oui, et pour combattre la peur, seul le courage peut venir à notre rescousse !
Merci à toi Laska.
Fabian